Lorsque le confort thermique ou la rénovation urbaine l’exigent, le Département enclenche la reconstruction de ses bâtiments, selon des normes environnementales élevées. C’est le cas à Malakoff, à Châtenay-Malabry et au Plessis-Robinson, où trois établissements vont être livrés lors de l’année scolaire.
Par Nicolas Gomont
Tous postes confondus, les collèges publics sont comptables d’un tiers des gaz à effet de serre (GES) émis par le Département. Un tel constat appelle des mesures de type rénovation thermique ou un pilotage plus fin des consommations énergétiques. « Pour les plus énergivores, les standards actuels restent inatteignables, même après une réhabilitation totale, explique Pol Creignou, directeur général adjoint chargé du pôle Éducation maintenance et construction au Département. Une reconstruction s’impose alors, sur site ou ailleurs, s’il y a lieu de repositionner le collège au plus près des bassins de vie et des transports. » À Malakoff, Henri-Wallon est de ceux-là : « passoire thermique », il nécessitait un remplaçant hors site. Boulevard Stalingrad, entre le parc Léon-Salagnac et le fort de Vanves, Charlotte-Delbo assumera cette tâche. Il sera livré cet automne et les élèves seront invités à « déballer » leur nouveau collège après les congés de Noël.
APPROCHE « BIOCLIMATIQUE »
Il n’est pas peu dire qu’ici, le parti architectural s’est teinté d’ambitions environnementales élevées. « Le bâtiment d’enseignement, épais et compact, se développera autour d’un patio central, générateur de lumière et espace de transition entre les niveaux du collège, dit Frédéric Gadan, co-fondateur de Valero Gadan Architectes & Associés. Cette compacité garantira une performance thermique accrue et un bâtiment peu énergivore. » Gage d’inertie, l’amplitude de ses façades sera réduite au minimum utile – un atout thermique -, sans que les apports de lumière naturelle ne s’en trouvent diminués, ou les vues offertes aux usagers tronquées. « Marquant l’alternance des pleins et des vides, les lames de béton verticales, rythmant la façade et donnant une unité à l’ouvrage, participeront avec les brise-soleils à la fraîcheur des espaces intérieurs », ajoute l’architecte. Cette prise en compte, dès la conception, de la santé, du confort à la fois d’hiver, d’été, mais aussi acoustique et visuel, est la marque d’une conception « bioclimatique ». L’insertion paysagère de l’édifice et de ses espaces extérieurs a fait l’objet d’une même attention ; le but étant cette fois de préserver la douceur et le calme portés par la nature et les vues dégagées du centre sportif, en cœur de ville. « Les toitures végétalisées du collège iront dans le sens de cette intégration au parc, dit Frédéric Gadan. Cette « cinquième façade », conçue comme un espace de quiétude, de rencontre et de jeux, offrira à l’agrément des logements alentour une continuité verte. »

Le collège Charlotte-Delbo ne communiquera pas physiquement avec le parc Léon-Salagnac, sa cour en « îlot vert » se trouvant légèrement encaissée par rapport à lui. Reste que ses espaces récréatifs s’en trouveront embellis, tout en cantonnant les élèves dans le périmètre clairement défini du collège. N’oubliant rien, un recours aux énergies renouvelables – de la géothermie extraite du réseau de chaleur de la ville – lui vaudront le label d’État E+C- (niveau E3C1), pour « bâtiment à énergie positive et émission de carbone réduite ». Modèle à plus d’un titre, Charlotte-Delbo n’est autre que le reflet des exigences du référentiel de qualité environnementale des bâtiments (QEB) du Département. « Il s’agit là d’une méthodologie exigeante, que nous mettons en œuvre pour nos nouvelles constructions et réhabilitations lourdes, avec l’ambition d’une sobriété énergétique exemplaire, explique le président du Département Georges Siffredi. Par ce référentiel, nous avons devancé les obligations règlementaires (RE2020, Ndlr) et veillons à anticiper les normes à venir. » Engendrés par la rénovation urbaine, ce cahier des charges, Gustave-Eiffel (Châtenay-Malabry) et Claude-Nicolas-Ledoux (Le Plessis-Robinson) le respectent à la lettre. Dans son principe, celui-ci impose un seuil de consommations énergétiques – 95 kWh au m2 contre 130 kWh en moyenne à ce jour – et un mix fait a minima de 30 % d’énergies renouvelables (En&R) : solaire, pompes à chaleur, biomasse, etc. À la pointe nord-est d’un nouvel écoquartier – baptisé LaVallée – l’enjeu énergétique était prépondérant à Gustave-Eiffel. Une installation de géothermie couvrira la totalité de ses besoins en chaleur ; ce sera 80 % à Claude-Nicolas-Ledoux. Réserve faite de Gustave-Eiffel – antérieur à l’engagement du Département en la matière -, la production sur place des repas sera la règle, comme dans tout nouveau collège.
LA PRISE EN COMPTE DE LA SANTÉ ET DU CONFORT, À LA FOIS D’HIVER ET D’ÉTÉ, EST LA MARQUE D’UNE CONCEPTION « BIOCLIMATIQUE »


RÉEMPLOI ET RECYCLAGE
Autre prescription du référentiel (QEB) : une cour de récréation en « îlot vert », appropriable par tous, avec sol en béton drainant, généreuses plantations, jardin pédagogique et classe « hors les murs ». « Seule entorse aux critères, Charlotte-Delbo, parce que situé au-dessus de carrières de gypse, ne se prêtait pas à une infiltration des eaux de pluie, concède Pol Creignou. En revanche, nous avons pu préserver les arbres de haute tige existants, tandis qu’à Gustave-Eiffel, la toiture végétalisée de 200 m2 inclura un jardin potager source d’applications pédagogiques. » L’appel à des matériaux biosourcés se manifestera par le recours au bois, pour la charpente à Châtenay-Malabry, pour le plancher au Plessis-Robinson, tandis que Malakoff disposera de faux-plafonds en fibre de bois issue de résidus de coupe. « Il s’agit à chaque fois d’utiliser moins de matériaux d’origine pétrolière, pour des raisons d’empreinte carbone et de pollution, comme le chanvre, qui ne va pas émettre de solvants volatils pendant sa durée de vie, contrairement au polystyrène », insiste Pol Creignou. Au terme de ces trois chantiers (février 2026 pour Gustave-Eiffel ; avril 2026 pour Claude-Nicolas-Ledoux), 90 % des déchets devront avoir trouvé leur solution de valorisation, à l’image de Charlotte-Delbo, ayant fait objet d’une dépollution pyrotechnique. Recyclage d’un côté, réemploi de l’autre ; le Département tâchera aussi de sauver ce qui peut l’être des ex-collèges, remis au bon vouloir des villes. « Pour la première fois, un marché de réemploi a été notifié et s’étend des portes aux fenêtres, en passant par le mobilier », explique Pol Creignou. Bouclant la boucle, toute une filière est en train de se construire pour donner une seconde vie à ces matériaux.
Nicolas Gomont